Depuis que le projet d'usine éolienne dans la région de la Molignée
(Condroz occidental - Province de Namur - Belgique) a été rendu officiel (23/12/2002),
le réseau Molignéole a reçu de nombreuses questions.
Après avoir examiné celles-ci une à une, il y a apporté les réponses suivantes :
C'est avant tout un objet technologique. Sur un plan purement esthétique, on peut donc aimer ou ne pas aimer. Il faut toutefois rappeler qu'en Belgique bien peu de gens ont déjà eu l'occasion de voir de près ou de loin une ou plusieurs méga-éoliennes de 145 m de haut (mât de 100 m + pale de 45 m). Les impressions de la majorité des Belges sont en réalité basées quasi exclusivement sur des photos de presse ou sur des images TV. Les médias nous présentent souvent les éoliennes de la manière la plus esthétique possible. Même la publicité s'est emparée de l'image des éoliennes. Cependant, l'" esthétique " de ces méga-éoliennes doit également pouvoir être appréciée dans les paysages concernés.
C'est méconnaître le fait qu'il y a encore des paysages remarquables en Région wallonne, d'ailleurs susceptibles d'être protégés par la Convention sur " La Protection des Paysages Culturels et Patrimoniaux " signée par la Région wallonne à Florence en juillet 2000, et des paysages dégradés, plus ou moins fortement, dans lesquels les éoliennes peuvent parfois être un élément restructurant (= réparateur) sur le plan visuel.
En matière d'impact paysager, il importe de faire la distinction entre la perception (notion subjective) et l'analyse (notion objective) d'un paysage.
Oui, une seule éolienne suffit à détruire et à déstructurer des paysages remarquables, notamment ceux de la région de la Molignée.
Une seule éolienne constitue aussi un dangereux précédent : en effet, puisqu'il y en a déjà une, pourquoi ne pas en mettre 1, 2, 3,... de plus ? Il y a toujours un effet boule de neige dans la dégradation d'un paysage : pourquoi ne pourrait-on pas implanter ensuite une route express, une ferme industrielle, une ligne à haute tension, etc. ? C'est la même chose que pour les déchets : prenez l'exemple d'une belle pelouse ou d'un beau parterre. Tant qu'il n'y a rien dessus, on se retient malgré tout un peu d'y jeter un déchet. Le premier qui lance une canette ou un emballage en plastique donne prétexte aux suivants pour faire de même.
Enfin, la Belgique est un pays à haute densité de population. Celle-ci a droit à conserver et à jouir de paysages remarquables malgré la pression des activités humaines.
Le réseau Molignéole n'est pas le seul à émettre cette affirmation : " Globalement la zone couverte par le bassin hydrographique de la Molignée s'inscrit dans un paysage rural mis en place et modelé depuis des siècles. Ce type d'organisation paysagère, aux nombreux héritages historiques, est, de nos jours, souvent ressenti comme un exemple d'harmonie et d'immuabilité que collectivement nous apprécions et sommes enclins à préserver de toutes agressions extérieures. " [extrait de l'étude intitulée Contexte paysager, réalisée par J.-M. LECRON (Laboratoire d'Ecologie et d'Unité de Biologie végétale - Faculté universitaire des Sciences agronomiques de Gembloux ) et publiée dans Bassin hydrographique de la Molignée - Volume 1. - Facteurs abiotiques par le COMITE SCIENTIFIQUE DE LA CONSERVATION DE LA NATURE ET DE LA PROTECTION DES EAUX asbl (Région wallonne - Direction Générale des Ressources Naturelles et de l'Environnement - ISBN 2-9600029-4-6 - 1999) (4ème partie - Pages 151 à 200)].
Dès sa création au début de l'année 2003, le réseau Molignéole a bénéficié du soutien de l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES SITES ET DES VALLEES DU NAMUROIS asbl (ADSVN) qui, par son manifeste du 30/01/2003 (http://www.moligneole.be/doc/adsvn.pdf), attirait l'attention du gouvernement wallon sur les graves lacunes en matière de protection des paysages remarquables de la Région wallonne dans le cadre du développement éolien. Dans ce manifeste, l'ADSVN rappelait que le " Cadre de référence pour l´implantation d´éoliennes en Région wallonne ", adopté en date du 18/07/2002 par le gouvernement wallon, était un document sans aucune valeur légale, simple répertoire de bonnes intentions et très laconique au sujet de la problématique paysagère.
En étroite collaboration avec l'ADSVN, le réseau Molignéole estime avoir contribué à la prise de conscience, entre autres, de l'importance de la problématique de l'impact paysager dans le cadre de l'implantation d'éoliennes en Région wallonne.
En ce qui concerne la région de la Molignée, l'opposition aurait été la même si le projet avait consisté à implanter une antenne de 145 m de haut. Mais dans ce cas, le réseau Molignéole se serait certainement appelé autrement…
Dès qu'une réflexion en profondeur est entreprise, cet argument est avancé à celui qui prend la peine de réfléchir.
Le réseau Molignéole croit que l'on peut très bien être favorable au développement éolien en Région wallonne et en même temps estimer qu'on ne peut pas faire n'importe quoi, n'importe où et n'importe comment. En réalité, la Région wallonne a encore un fameux chemin à parcourir pour faire face au développement anarchique de l'énergie éolienne, favorisé en cela par les entreprises privées qui entendent bien profiter des avantages financiers dans le cadre des Certificats verts.
INTER-ENVIRONNEMENT-WALLONIE asbl, la fédération des associations d'environnement actives en Wallonie, dans son avis en matière de développement éolien en Région wallonne (http://www.iewonline.be/Positions/Energie/EolienneRW.pdf) (juin 2003), souhaite notamment la création de zones d'exclusion de toute éolienne. Le réseau Molignéole partage ce souhait et estime quant à lui que, du fait de la valeur des paysages remarquables de la région de la Molignée, celle-ci devrait figurer dans la liste des zones d'exclusion.
De nombreuses voix, et non des moindres (Hubert REEVES, GREENPEACE,…), préconisent le développement éolien en mer (off-shore), principalement du fait du potentiel venteux important et permanent mais aussi pour des raisons paysagères. Le réseau Molignéole s'intéresse vivement à ces avis qui élargissent considérablement le débat, actuellement limité - et le réseau Molignéole le regrette vivement - à la Région wallonne.
Ne tombons pas à nouveau dans la fatalité de toutes les implantations industrielles et autres, soi-disant indispensables à notre bien-être mais indiscutablement destructrices de notre cadre de vie (la législation européenne reconnaît pourtant le droit de chaque citoyen à vivre dans un environnement sain, sûr et agréable). Ce même pseudo-argument a servi par le passé pour les autoroutes, les lignes à haute tension, les installations agro-industrielles, les industries, les zonings industriels, les " grandes surfaces ", les aéroports, etc.
Même si la personne montrée du doigt est justement et personnellement attentive à polluer le moins possible et à faire des économies d'énergie, elle portera donc seule la responsabilité des changements climatiques !?! C'est évidemment intellectuellement malhonnête d'autant plus que ceux qui tiennent ces propos ne sont pas toujours enclins à faire des efforts personnels sur ce plan.
Un exemple ? " La période de juillet à septembre 2003 a été marquée par les plus fortes moyennes journalières de trafic aérien jamais enregistrées dans le ciel européen. Le ? record absolu de tous les temps ? a été atteint le 12/09/2003 avec 28.173 vols enregistrés dans les 31 Etats membres d'EUROCONTROL, organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne. Un court instant freinée par les attentats du 11 septembre 2001, la croissance du transport aérien a repris de plus belle, au grand plaisir de nombreux observateurs issus des milieux économique et politique. Ceux qui se saoulent ainsi de chiffres records pourraient utilement tenter une petite cure de désintoxication en consommant d'autres chiffres qui, s'ils appartiennent aussi à la catégorie ? records ?, sont nettement moins grisants : ceux relatifs aux émissions de gaz à effet de serre, par exemple. " (MoTEUR! N° 120 du 17/10/2003, périodique hebdomadaire publié par la fédération INTER-ENVIRONNEMENT-WALLONIE asbl).
Les changements climatiques sont à présent reconnus par la quasi totalité de la communauté scientifique internationale. Or ces changements climatiques engendrent une continentalisation du climat de nos régions tempérées : pluies abondantes en hiver et sécheresse en été. Durant l'été 2003, du fait des fortes chaleurs et de la canicule, il n'y a pas eu beaucoup de vent. La rentabilité des éoliennes implantées sur terre est donc directement affectée par les changements climatiques. Triste paradoxe ! Il faut donc avant tout stopper la croissance de la consommation énergétique et remplacer progressivement l'utilisation des énergies fossiles par des énergies renouvelables réellement respectueuses de l'environnement.
On peut très bien être à la fois partisan des énergies renouvelables réellement respectueuses de l'environnement et opposé aux méga-éoliennes destructrices des paysages remarquables. Ce n'est pas du tout incompatible !
Kyoto c'est aussi et surtout consommer moins et autrement. Si les éoliennes servent principalement à compenser la demande croissante d'énergie et que nous conservons l'utilisation d'énergies fossiles, quel va alors être le gain réel pour les objectifs de Kyoto ?
INTER-ENVIRONNEMENT-WALLONIE asbl, la fédération des associations d'environnement actives en Wallonie, dans son avis en matière de développement éolien en Région wallonne (http://www.iewonline.be/Positions/Energie/EolienneRW.pdf) (juin 2003), insiste très justement sur l'importance des Energies Renouvelables (ER) et sur l'Utilisation Rationnelle de l'Energie (URE) : " Ainsi, si aucune mesure efficace n'est mise en œuvre pour contrer l'augmentation de la consommation d'électricité, les éoliennes ne constitueront pas une alternative à d'autres sources de production d'électricité comme le nucléaire ou les centrales au charbon mais bien un nécessaire complément. Investir massivement dans les énergies renouvelables ne suffit donc pas : sans politique volontariste de maîtrise des consommations, un tel investissement reviendrait purement et simplement à jeter l'argent public par les fenêtres. " Difficile d'être plus clair !
Dans l'hypothèse où le projet d'usine éolienne devait malgré tout se réaliser dans la région de la Molignée, la pire situation serait la suivante : des paysages remarquables seraient détruits pour de nombreuses années (au moins 20 ans) tout simplement pour satisfaire à une croissance sans retenue - gaspillages compris - de la consommation électrique.
Est-il souhaitable que nos communes vendent leurs paysages remarquables - hérités des générations qui nous ont précédés et que nous devons transmettre aux générations qui nous suivront - à des firmes privées qui bénéficient d'avantages financiers - les fameux Certificats verts - indirectement pris en charge par les consommateurs. La question n'est pas nouvelle : l'argent ainsi obtenu par les communes sera une forme de compensation pour les dommages subis (destruction des paysages et nuisances de divers types). Quant à savoir ce que les communes feront avec ces rentrées financières pour protéger ou améliorer le cadre de vie de leurs concitoyens, la question mérite de leur être posée.
Les agriculteurs de la région de la Molignée sont déjà des privilégiés : selon une étude relative à la commune d'Anhée (probablement extrapolables aux autres communes concernées par le projet d'usine éolienne : Fosses-la-Ville, Mettet et Profondeville) et effectuée par la FONDATION RURALE DE WALLONIE (document intitulé " Programme communal de développement rural " daté de septembre 2002), les agriculteurs (de la commune d'Anhée) bénéficient des revenus agricoles les plus élevés de Wallonie ! Ont-ils alors réellement besoin de ce supplément financier ? Les revenus de l'implantation d'éoliennes ne présentent aucun rapport avec l'activité professionnelle des agriculteurs. Par ailleurs, il y aura une discrimination entre agriculteurs : pourquoi celui-ci et pas celui-là ?
Destruction de paysages uniques et exceptionnels et risque majeur d'empêcher la protection de ceux-ci dans le cadre de la Convention de Florence signée par la Région wallonne. De plus, rien n'empêchera à l'avenir de nouvelles destructions de ces paysages (pylônes à haute tension, antennes GSM, hangars agricoles, etc.) dans la mesure où une réelle banalisation des paysages aura été générée par l'implantation d'éoliennes.
Gigantisme et sentiment d'oppression, de nuit comme de jour.
Dévalorisation immobilière.
Nuisances sonores (sons audibles et basses-fréquences), radioélectriques et électromagnétiques ayant des effets néfastes sur les habitants, sur le bétail et sur la vie animale.
Proximité de zones de grande valeur naturelle (NATURA 2000) et impact négatif sur les flux migratoires de la faune sauvage (oiseaux notamment).
Déséquilibres socio-économiques : un gros investissement financier pour un faible rendement énergétique et un nombre réduit d'emplois temporaires créé.
Exemple de ce qu'il ne faut pas faire : l'implantation d'une usine éolienne dans la région rurale de la Molignée risque d'être un dangereux précédent à des projets du même type en Région wallonne. Qui empêchera en effet l'implantation de nouvelles usines éoliennes dans d'autres paysages de grande valeur (vallée du Viroin, Condroz occidental et oriental, etc.) ?
La législation wallonne en matière de permis unique permet à la population de donner son avis et de marquer son opposition lors de l'enquête relative à l'Etude des Incidences sur l'Environnement (EIE). Pourquoi se priver d'agir dans un cadre légal ? Et, en plus, il restera des possibilités de recours administratifs et/ou auprès du Conseil d'Etat.